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Laura Gramaglia, cavalière monégasque.Laura Gramaglia, cavalière monégasque.

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EQUITATION – Mais qui es-tu, Laura Gramaglia ?

A chaque numéro, Code Sport Monaco vous propose de découvrir les athlètes de la Principauté sous un autre angle. Laura Gramaglia, cavalière monégasque qualifiée pour les Mondiaux U21 d’endurance équestre, s’est prêtée à l’exercice du « Qui es-tu ? ».

Ta première passion ?

L’équitation. Ma mère, qui faisait du dressage, m’a mis le pied à l’étrier. Mon père, lui, n’était pas du milieu, mais il nous accompagnait volontiers. Je me suis retrouvée sur une selle avant de savoir marcher.

Ton premier souvenir ?

Je me souviens de ma mère me portant pour m’asseoir sur un de ses chevaux afin de le brosser. Je revois la scène avec mes parents à côté, c’est un peu flou. Je devais avoir quatre ans.

Pourquoi l’équitation ?

C’est dur à dire. Peut-être que d’avoir grandi en contact permanent avec des animaux de compagnie comme des chiens et des chats a joué un rôle. L’équitation est un sport d’équipe différent du basket ou du football où l’on joue dans un collectif. On est lié à un cheval de 500 kilos : s’il n’a pas envie de bouger, on reste planté ; si vous ne vous comprenez pas, vous n’avancez pas. Il faut créer une connexion, une harmonie. C’est ce qui m’a principalement attirée.

Laura Gramaglia allie études et carrière sportive.
Laura Gramaglia allie études et carrière sportive.

Comment la créer ?

Cela passe aussi bien par du travail à pied que par des moments de complicité avec le cheval. A cause de mes études, je ne suis pas la seule à monter ma jument. Mais mon temps avec elle ne se résume pas à la brosser, à me promener avec elle et à la remettre dans l’écurie. Je m’en occupe, j’essaie de lui apprendre des choses. Ce sont des manières de lui montrer mon amour. Les chevaux ressentent l’affection, ils apprécient les câlins. Ce sont des êtres très, très sensibles. Un cheval qui se sait bien traité et qui aime ses propriétaires donnera tout en retour.

Le quotidien de tes juments ?

Elles ont besoin d’être actives. Raya a 17 ans. Elle part à la retraite en novembre. Elle réalisera son avant-dernière course aux Mondiaux, avant de partir dans un pré pour concevoir un poulain et profiter d’un repos bien mérité. En raison de son métabolisme particulier, elle doit travailler et se dépenser tous les jours pour rester en forme. L’autre a six ans et sort six jours sur sept. Je ne l’ai pas encore présentée en compétition. Mon entraîneur Henry-David Guedj se charge de les faire travailler. Suivant les jours, il leur fait faire du tapis, de l’allonge, un peu d’assouplissement, des fractionnés… Ce sont de véritables athlètes de haut niveau.

Les qualités d’une bonne cavalière ?

Le mental domine l’aspect physique. J’ai terminé des courses en pleurs, avec des douleurs atroces, des entorses, des bobos qui m’ont empêchée de marcher le lendemain. Une course de 120 kilomètres implique de tenir plus de huit heures en équilibre. Le galop se fait en gainage. La contrepartie ? On voit des paysages magnifiques !

Ta motivation ?

Un cavalier se demande très régulièrement pourquoi il s’inflige ce traitement. Cependant, je ne me suis jamais dit, après une course, que j’allais arrêter. La passion prend toujours le dessus. Peut-être que si je n’avais pas la même équipe autour de moi… (Elle s’arrête) Ça m’aide de me savoir entourée, d’être en confiance. Dans certaines équipes, l’aspect humain est délaissé au profit des résultats. Dans la nôtre, c’est le contraire : les cavaliers sont écoutés, ils ne sont pas poussés à faire des résultats même si l’esprit de compétition existe forcément. C’est toujours une petite fierté de terminer une course avec son cheval. Il m’est déjà arrivé de pleurer à l’arrivée tellement j’étais fière de ma jument.

Ton rituel avant une course ?

Ça peut paraître niais, mais je parle à ma jument en la caressant au niveau de la tête : « Ma fille, on va y arriver, on va finir cette course, tu dois m’aider pour ça. » Pendant l’épreuve, j’essaie de rester concentrée sur l’instant présent. Je ne pense pas à la distance qu’il me reste à parcourir. Quand je n’en peux plus, je pense aux personnes qui m’ont aidée, comme mon entraîneur qui est à fond derrière moi et me fait confiance, ou ma mère. Sans elle, je ne pourrais rien faire. Elle prend de son temps, donne de sa personne. A mon âge, il est compliqué financièrement d’entretenir ses chevaux. Et mentalement, elle trouve toujours les mots pour m’encourager. Ça me fait quelque chose quand elle me dit qu’elle reste fière de moi quoi qu’il arrive. Dans les moments les plus durs, je pense à mon père. Il est décédé quand j’avais cinq ans et demi. J’ai envie de le rendre fier, et je sais qu’il n’aimerait pas me voir abandonner.

Laura Gramaglia et Khalina De Lafayette représentant le Team EFG Monaco.
Laura Gramaglia et Khalina De Lafayette représentant le Team EFG Monaco.

Ton meilleur souvenir ?

Quand j’ai constaté la connexion avec ma jument en compétition. Mes problèmes de chevilles et de genoux me fatiguent pendant les courses. Si je me bats avec le cheval, que j’ai du mal à le freiner, que je dois toujours le canaliser car il accélère, je ne m’en sors plus. Raya ressent mon état physique et comprend instinctivement ce qu’elle doit faire. C’est un signe qu’elle me fait confiance et que le travail paie. Parfois, je me demande bien comment j’aurais terminé certaines courses si elle n’avait pas été là pour m’aider.

Tes études ?

Je suis en troisième année à Skema, une école de commerce basée à Sophia-Antipolis. J’avoue que mon choix a été dicté par la proximité géographique avec mon lieu d’entraînement. Il existe un statut « sportif de haut niveau » dans cette école qui me permet de m’entraîner régulièrement. Sous réserve de justificatifs, je peux rater un examen pour une course et le repasser sans être pénalisée ou modeler mon emploi du temps. J’essaie de ne pas avoir cours le lundi et le vendredi pour passer quatre jours à Monaco et partir en compétition l’esprit tranquille, sans avoir à m’inquiéter du timing. Dans deux ans, je suis censée partir une année à l’étranger. J’ai choisi Barcelone au détriment de l’Afrique du Sud ou des Etats-Unis pour ne pas être trop éloignée.

Le métier que tu rêverais d’exercer ?

J’adorerais importer en France des idées qui cartonnent à l’étranger : voyager, découvrir ce qui se fait ailleurs, faire des études de marché, les tester dans des endroits… En classe de première, j’avais remarqué quelque chose qui existait uniquement aux Etats-Unis. Une influenceuse parisienne a connu le succès avec cette idée, même si elle ne l’a pas développée sur la Côte d’Azur. Si personne n’y pense, j’aimerais bien l’introduire dans le coin à la fin de mes études ! (Elle rit)

Le sport que tu aurais aimé pratiquer professionnellement ?

Sans mes problèmes aux articulations ? Le ski ! Je faisais des petites compétitions avant ma première blessure à dix ans. J’aurais bien aimé intégrer un club et skier.

Une anecdote que tu n’as jamais révélée ?

Une de mes chutes les plus drôles aurait pu être une scène de dessin animé. Il y a deux ans et demi, on arpentait la forêt de Gorbio avec mon cheval et, sur le chemin en terre, il y avait un arbre affaissé. Ma jument passe, mais elle s’accroche un peu à l’arbre. Une branche lui tapote les fesses. Elle a pris peur et elle est partie au trot. Tous les cavaliers qui liront cette interview comprendront : le premier réflexe pour arrêter un cheval dans cette situation, c’est de se redresser et de placer les épaules en arrière. Le faire sous un arbre n’était pas une bonne idée. Je me suis pris la branche dans le front et je me suis retrouvée par terre. J’étais bien assommée. Heureusement que le cheval n’a pas donné un coup de pied… et que personne ne m’a vue. (Elle rit aux éclats)

Jérémie Bernigole

Publié le 30 Oct. 13:18